Le sorcier – Jérémy BOUQUIN

La campagne a aussi ses marginaux. Raoul en est un. Autour de sa caravane, il stocke les monstres qu’il a chinés. Des tatouages lui couvrent le dos. Il nourrit les rumeurs au troquet du village mais il s’en fiche. Il ne cherche pas le contact. En revanche, tout le monde sait où trouver Raoul, quand les médecins baissent les bras devant la maladie. Ou quand la petite Margaux disparaît dans la nature.

Jérémy Bouquin est un auteur un peu atypique, difficile à classer, qui œuvre essentiellement dans le noir. Son genre de prédilection est le roman social, mais c’est un touche-à-tout – thriller, polar, SF, fantastique, post-apo – qui réussit partout où il passe.

De son écriture si particulière, avec ses phrases courtes, parfois lapidaires, il peint des tableaux saisissants d’atmosphères, mais surtout de personnages étranges, borderline, décalés, en marge, cabossés le plus souvent.

Dans ce petit roman – ou cette grosse nouvelle –, il nous conte l’histoire d’un rebouteux, magnétiseur, un peu médium, prophète à ses heures. Surnommé Le sorcier par les habitants du coin, c’est un marginal, un ex-taulard et surtout un coupable idéal.

À l’instar de nombreux films ou romans, comme dans Quelques messieurs trop tranquilles de Georges Lautner, par exemple, le sujet traite du paria que l’on tolère, voire dont on profite dès lors qu’on en a besoin, mais qui devient vite un bouc émissaire en cas de problème, qui plus est en cas de crime.

En quelques mots apparemment juste jetés, mais qui recèlent souvent une force peu commune, l’auteur arrive à nous transporter, à nous peindre des paysages et des ambiances, à donner vie à des personnages banals et en même temps si surprenants qu’on ne les oublie pas de sitôt. Si terriblement humains surtout.

C’est sobre, brut, cru, mais jamais vulgaire. C’est percutant et poignant. C’est du Jérémy Bouquin.

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