J’ai lu ce livre dans le cadre du Prix des Auteurs Inconnus 2020 pour lequel je suis jurée dans la catégorie Littérature noire depuis sa création, il y a quatre ans maintenant. Avant toute chose, je vous rappelle que, pour effectuer notre présélection parmi les soumissions proposées par les auteurs (une soixantaine rien qu’en littérature noire cette année), nous avons en notre possession trois éléments : la couverture, la quatrième ainsi que les dix premières pages. Après avoir éliminé ceux qui comportent plus de trois fautes parmi ces dix premières pages, nous devons voter pour les cinq romans qui nous ont semblé les plus prometteurs, puis lire les sélectionnés en entier cette fois, avant de les chroniquer et de voter à nouveau afin d’élire le gagnant.
« David… ? C’est moi, c’est Vincent ! Il faut que tu viennes ! Il faut que tu me rejoignes dans notre village d’enfance… il s’est passé quelque chose… c’est horrible, je n’ai jamais vu ça !… »
Une disparition anormale, un meurtre sans précédent, un village divisé entre croyances et superstitions, une atmosphère étouffante…
David et Vincent, deux gosses d’Assieu devenus flics, vont s’immerger dans cette enquête, et sans le savoir vont descendre aux portes de l’enfer…
Némésis est la troisième lecture que j’effectue dans le cadre du prix de cette année et je précise que ce roman figurait parmi les cinq titres de ma présélection malgré la scène effroyable que contient le prologue. J’ai d’ailleurs longuement hésité à l’inclure dans mon choix, à cause de cette scène justement. Je ne suis pas du tout adepte du sensationnel, des meurtres gore, des histoires trop glauques et des tortures outrageusement détaillées et il se trouve que dans Némésis, ces dernières le sont particulièrement. Le pire étant qu’elles sont perpétrées… sur des bébés. Alors pourquoi ne l’ai-je pas purement et simplement éliminé me direz-vous ? Eh bien parce que l’intrigue me semblait intéressante et que j’étais curieuse de connaître l’explication à cette horreur. Le titre a également joué pour beaucoup. Némésis, nom de la déesse grecque de la justice et de la vengeance laissait augurer des thèmes que j’affectionne particulièrement. Je reconnais aussi avoir espéré – dire que j’ai croisé les doigts serait plus juste – que cette horrible scène serait la seule. Hélas ! Trois fois hélas, puisqu’elles sont finalement au nombre de trois et que j’ai dû endurer leur difficile lecture qui m’a glacé le sang et menée à la limite de la nausée. Alors d’accord, l’horreur peut sembler ici justifier le propos et ne rien devoir à la gratuité, mais le choix des victimes reste quand même extrêmement dérangeant et les détails presque insoutenables. Il est clair que c’est cela qui est pour beaucoup à l’origine de mes réticences ; j’avoue bien volontiers que si ces victimes avaient été des adultes je n’aurais sûrement pas ressenti cette épouvante aussi intensément.
Mais je ne vais pas m’éterniser là-dessus, d’autant que j’imagine aisément qu’une bonne part des amateurs de thriller s’en repaîtront avec délice. Je vais maintenant parler des qualités de ce bouquin, parce que là, par contre, je tire mon chapeau à Xavier Massé ! Jamais je n’aurais imaginé une intrigue aussi tortueuse et originale ! Une belle surprise de ce côté-là que je ne subodorais pas le moins du monde et qui a eu le mérite de me faire un peu oublier mon malaise quant au sort des victimes. L’enquête est intéressante, l’écriture pourrait à mon sens être un peu plus travaillée mais reste honnête, le suspense est présent, il y a de l’action et l’auteur nous perd à loisir afin qu’on ne voie rien venir. J’ai soupçonné plusieurs personnes mais n’ai jamais approché le mystère et cela m’a beaucoup réjouie. Côté traitement, on flirte avec le paranormal sans y rentrer jamais complètement ; j’aurais peut-être préféré que ce soit un peu moins hésitant, ou un peu plus défini, mais ça reste un détail. Le sujet de fond, quant à lui, est sûrement éternel et pose, lors de débats sans fin et souvent houleux, toujours la même question : et vous, que feriez-vous ?
Une lecture intéressante donc, avec une intrigue originale, à réserver cependant à un public averti !
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